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Quel type de capitaine êtes-vous à la barre du restaurant en pleine tempête ?

Par Thiery Poupard

Les attitudes des entreprises face à la crise sont très contrastées : il y en a qui ne modifient rien à leur stratégie, celles qui remettent en cause leurs fondamentaux et d’autres qui prennent les mesures qui s’imposent. Donc, trois typologies, semblables à celles des navigateurs devant prendre une décision lorsque, au large, sévit la tempête : le capitaine optimiste espère que ça va se calmer, le pessimiste change de cap et le réaliste ajuste la voilure.

Dans la restauration, la baisse de fréquentation affecte particulièrement les enseignes qui ont omis d’assouplir leur offre vis-à-vis du contexte et des tendances actuelles (i.e. manger léger et rapidement, moins consommer d’alcool et, désormais, dépenser moins le plus fréquemment et festivement de temps en temps). Elles n’ont pas modifié l’équation qualité/quantité/prix dans leur gamme de produits ou de formules, elles rééditent la sempiternelle promo pour leur nième anniversaire, elles mettent en avant des produits qui ne motivent personne ou elles ne proposent rien de nouveau. Certains restaurants fonctionnent sur un concept de menu complet comprenant apéritif, entrée, plat, dessert, vin et café. Cette rigidité dans le choix devient rédhibitoire quand le tout est à 38 Euros, un prix ni haut de gamme ni économique. Il faut une sacrée dose d’optimisme pour ne rien changer à une offre, un programme ou un plan marketing qui s’avère désormais caduque pour cause d’inadéquation avec la réalité ou de répétition du passé. Or, ce qui a bien fonctionné hier n’offre pas la moindre garantie de succès dans un environnement bouleversé. Sans doute faut-il prier pour que la tempête passe, mais en attendant, ce sont les clients qui passent… sans entrer.

Chez les pessimistes, ceux qui doutent et remettent en cause les acquis, figurent les établissements qui ont rogné sur la formation du personnel. C’est juste oublier que la formation est plus importante que jamais pour accroître les performances et les résultats. D’une part, chaque Euro investi dans la formation représente une économie d’autant dans des dépenses pas toujours productives et, d’autre part, chacun sait qu’une équipe bien formée à l’accueil et au service transforme un client occasionnel en un client fidèle. Certains établissements renouvellent leur décor pour un budget qui, si tant est que cela ait en effet positif sur la fréquentation, sera très, très long à amortir. Et puis il y a les restaurants qui cassent les prix. Or c’est une gageure de penser que vendre 9 Euros ce que l’on vendait 18 au préalable n’a pas d’incidence négative sur la perception du client à propos de la qualité, des portions, de l’hygiène, de la propreté, du service et, pour l’entreprise, de la rentabilité. Les changements radicaux de cette nature résultent d’un doute sur la validité du concept existant. Et un capitaine qui doute transmet cette crainte à l’équipage qui, lui-même, la laissera transparaître aux passagers. La récession affecte aussi le mental et une bonne stratégie repose d’abord sur un état d’esprit. Ce n’est pas le moment de changer de destination et encore moins d’embarcation alors que le contexte ne réclame que de convenablement régler les voiles.

Les réalistes sont les établissements, les enseignes et les chaînes qui font face et s’adaptent, qui analysent scrupuleusement toutes les améliorations qu’il est possible de réaliser et mettent en place une série de mesures simples, rapides et efficaces. Ce sont ceux qui ont plus pensé pouvoir d’achat que gadget, qui ont retiré de leur plan d’actions les offres ne correspondant pas aux attentes du moment, qui ont introduit un produit ou un plat attractif à prix intermédiaire, poussé les ventes complémentaires comme le vin au verre, le café à un Euro ou le café gourmand, amélioré l’accueil et le service, réduit leurs dépenses dans les médias et investi dans l’Internet, étudié la possibilité de vendre à emporter ou de livrer, donné beaucoup de visibilité à ces nouveautés… bref, ceux qui ont appliqué des remèdes anticrise efficaces. Lorsque l’activité est au ralenti tous les opérateurs devraient se concentrer sur les choses qu’ils n’ont jamais le temps de faire lorsqu’elle est soutenue, et prendre bien garde au fait que certaines décisions étant irréversibles, toutes doivent être mises en œuvre dans une vision de pérennité, c’est à dire d’après crise. Le plan marketing durable aura peut-être été inventé par certains.

La situation actuelle n’est ni une fatalité, ni une opportunité, mais elle oblige à regarder un peu plus loin que le chiffre de la fin de journée, à aller un peu plus vite que la routine habituelle, à agir un peu plus avec la tête plutôt que de gesticuler et, surtout à ne pas paniquer ni sombrer dans la morosité et l’attentisme. En réaction à l’empilage continu d’annonces toujours plus déprimantes, le vrai sujet devrait être moins la crise et ses victimes que les moyens de faire avec… et de s’en sortir.

Chronique N°57 – 19/02/2009 – Néorestauration

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