Restaurants clandestins, restaurants en faillite, restaurants novateurs
L’été 2015 ne restera pas gravé dans les mémoires comme celui des scoops, mais des confirmations d’évolutions déjà constatées. Les mois écoulés ont mis au grand jour le grand écart qui existe entre professionnels du secteur, opérateurs et syndicats, un ancrage sur le passé pour les uns et une vision d’avenir pour les autres.
L’ « UBERISATION » FAIT ECLORE LES RESTAURANTS CLANDESTINS
L’émergence des prestations professionnelles effectuées par des particuliers gagne chaque jour de nouveaux secteurs ; voici venu le tour de la restauration. Des particuliers ont l’outrecuidance de proposer aux voyageurs des repas payants à leur domicile. Le Synhorcat, par la voix de son Président Didier Chenet, s’insurge et dénonce ces « restaurants clandestins », expression reprise par la quasi totalité des médias ; copié-collé, sans analyse.
Clandestin : « Qui se fait en cachette et qui a généralement un caractère illicite (Petit Robert). Chacun appréciera : en cachette, non, car ces particuliers sont inscrits et identifiés sur des plateformes (VizEat, Cookening, Voulezvousdiner ou Viensmangeralamaison.fr), illicite, pas plus parce que aucun cadre législatif n’existe à ce jour. Le gouvernement parle de mettre en place une « stratégie nationale destinée à promouvoir, sécuriser et soutenir le développement de l’économie collaborative » (La Tribune). Si l’économie numérique et collaborative prospère et affole les compteurs des professionnels traditionnels, c’est parce qu’elle est apporte une prestation et/ou une qualité de service qui n’existent pas. Il vaudrait mieux chercher à connaître ce qui motive un nombre grandissant de consommateurs à prendre un repas chez un particulier plutôt que dans un restaurant.
LES DINOSAURES SE RAPPROCHENT-ILS DE LA FAILLITE ?
Après le très médiatique ralentissement de McDonald’s, c’est au tour d’autres grandes enseignes de fléchir. Le Groupe Flo a connu une perte nette de 35,7 millions d’euros sur son exercice 2014 contre un bénéfice net de 7,9 millions en 2013. Le Chiffre d’Affaires a chuté de 9,6% l’an dernier, et c’est la restauration à thème (Hippopotamus, Tablapizza), subissant une baisse de fréquentation depuis des mois, qui est la plus impactée avec un -12%. Il paraît que le groupe a « élaboré un plan stratégique ambitieux et volontariste » pour retrouver le chemin de la croissance rentable (Le Figaro Economie).
Second dinosaure qui ne se porte pas mieux, Flunch. Selon Capital, « la fréquentation de ses 266 restaurants a chuté de 8% en 2013 et encore de 3,8% sur le dernier exercice ». Mais un plan a été mis au point pour redresser la pente : réduction des coûts matière « en renouvelant un à un les appels d’offres » auprès des fournisseurs, baisse des prix, réduction des effectifs, donc de la qualité du service, lancement du Flunch Drive et nouvelle campagne de pub dont le slogan est «Il n’y a que chez Flunch qu’on peut fluncher.»
Résultat : ces enseignes, comme d’autres, semblent ne plus avoir d’autre salut que de se jeter dans les bras de Groupon et des promotions à prix cassé qui sont juste un palliatif à court terme, en aucun cas un investissement dans l’avenir.
LE NOMBRE DE RESTAURANTS NOVATEURS EXPLOSE
Hélas, penser encore aujourd’hui que bien manger à prix réduit est la clé du succès est un leurre absolu. C’est ce que les créateurs de jeunes enseignes ont compris. Ils ont observé que ce n’est pas « le consommateur qui a changé », mais une génération toute entière alors que tant de restaurants et de chaines ont été élaborés par et pour les Baby Boomers. Or cette tranche d’âge a déjà été remplacée par la génération X (34-49 ans) et les Millénials, les 18-33 ans, la génération Apple, Samsung, applis, réseaux sociaux, start-ups, économie collaborative, financement participatif, créativité, bien placée pour savoir que la qualité a un prix et que manger bien coûte plus cher.
Or ces nouveaux consommateurs ont des attentes tout autres que celles de leurs ainés : ce sont eux qui font décoller les restaurants fast-casual, les endroits où l’on mange sain, frais, bio, local, naturel… Les générations post Baby Boomer ont remplacé leurs ainés en tant que moteurs de la fréquentation des restaurants, mais dans d’autres lieux.
Cela explique largement le succès d’une multitude de jeunes enseignes. Mais peuvent-elles aspirer à devenir de McDonald’s du futur ? La réponse est non en raison d’une fragmentation galopante des segments et à l’intérieur de chacun. Le cas du sandwich premium l’a démontré avec ses Cojean, Jour, Exki, Prêt-à-Manger, Lina’s pour ne citer que les principaux noms. Et aujourd’hui le même phénomène s’amplifie pour les gourmets burgers avec des enseignes qui naissent tous les jours. Désormais, comme j’ai pu l’écrire dans un article récent, le développement, l’expansion des nouvelles chaînes se fera plus lentement mais plus surement.
Dans d’autres segments de marché des tendances apparaissent, des concepts émergent des produits se créent : mobilité en tout genre, fusion boutique restaurant, mixité de concepts, cantines chic, etc. Pour en avoir un aperçu, Blog 1001 Menus de 1001 Menus en a répertorié dix. A lire pour qui veut aller de l’avant, ou plutôt, au-devant des Millénials.
Il est certain que les vieilles recettes, les vieux médias, ou les vieilles méthodes n’ont aucune chance de redresser une chaîne en difficulté et encore moins d’en lancer une nouvelle. Et bien malin qui pourrait prétendre à la longévité d’une enseigne car le succès d’un jour ne préfigure pas la réussite de demain. Aux Etats Unis, une étude de la très sérieuse Cornell University a mesuré qu’un quart des restaurants faisaient faillite avant la fin de la première année et plus de 50% après deux ans. La raison est que la plupart ont pêché dans la mise en place d’un ou plusieurs facteurs de réussite que sont un business plan solide, un avantage compétitif fort, un modèle économique sain, un marketing intelligent et beaucoup de souplesse pour s’adapter.
Cet article est paru sur snacking.fr le 15 septembre 2015
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