Burger, hot dog, fréquentation, américanisation… au Congrès du Snacking
Hé oui, une fois encore il a été question entre autres de hamburgers et de gourmet burger au 6è Congrès du Snacking qui s’est déroulé jeudi 4 juin 2015 à Paris. Un thème qui a alimenté nombre de prises de parole. De quoi confirmer, comme je l’ai déjà écrit, que la révolution du burger est bien en marche. Mais bien d’autres sujets ont été abordés lors de cette riche journée dont je vais vous livrer une sélection à travers du prisme des 5Ps du marketing après un point rapide sur le marché.
LE MARCHE : TOUJOURS EN DIFFICULTE
Les chiffres du marché ont été présentés par NPD, Food Service Vision, CHD Expert, « parmi les meilleurs experts dans le domaine », a souligné Paul Fédèle, rédacteur en chef de France Snacking qui animait cette journée et dont je partage ce point de vue. Des cabinets qui, malgré leur notoriété ne manquent jamais de rappeler la méthodologie inhérente à leurs chiffres et analyses. Question température du marché en 2014-2015, hélas, rien de nouveau ! Pas de scoop ou de sortie du tunnel ; les années se suivent et se ressemblent. Seul fait marquant, la désaffection de la clientèle touche désormais également la restauration rapide : en nombre de visites, +0,5% en 2012, -2,2 en 2013, -1% en 2014 et -1,8% au premier trimestre de cette année. La crise reste la principale raison de la faiblesse de l’activité de la restauration. De conjoncturelle elle devient structurelle si bien qu’elle fait aujourd’hui partie d’un décor dans lequel il faut fonctionner.
Photo lechef.com
PRODUIT : UNE ANGLOSAXONISATION GRANDISSANTE
Le burger traditionnel de McDonald’s et consorts s’essouffle. La cause en serait la génération des Millénials (18-34 ans) : plus sensible que leurs ainés au manger sain et aux produits frais. Ces consommateurs se détournent de ce qui est industriel, de la junk food, des sodas trop sucrés et, par conséquent, des enseignes qui en ont fait leur succès. Aux Etats-Unis, toutes les chaînes de restauration rapide ont entamé un processus de suppression de tout ce qui est artificiel dans leurs produits. Les campagnes anti-obésité et sanitaires semblent porter leur fruit et, comme le pense Gilles Fumey, géographe de l’alimentation, certaines catégories de produits ne vont pas tarder à être assimilées à l’alcool ou au tabac et mises au ban de la société.
Alors le gourmet burger (frais, qualitatif, local, à la commande…) est apparu avec le succès rapide qu’on lui connaît. A tel point que McDonald’s va s’y lancer, signe qu’il ne s’agit pas d’une mode mais plutôt de la marginalisation annoncée du burger des Baby Boomers. Il a également été question de hot dog (illustré par la nouvelle enseigne Gabe présentée lors du speed dating Concepts en même temps que 9 autres nouveaux concepts) auquel d’aucuns promettent un grand succès. Si l’on ajoute les Bagels, on assiste à une indéniable « anglosaxonisation » de la restauration rapide, au rythme et à la sauce française.
PRIX : FREIN POUR LES UNS, ACCELERATEUR POUR D’AUTRES
Le rôle du prix en tant que critère dans le choix du lieu pour un repas s’est amplifié. Les enseignes tentent de les serrer autant que faire se peut et/ou proposent de petits produits à 2€ ou des formules pour 4 ou 5€. Mais la question de leur efficacité a été posée au regard de la baisse de la fréquentation qui se poursuit.
Il a été aussi question du Fast Casual et de Chipotle en tant que segment qualitatif et attractif grâce, entre autre critère, à une nourriture plus saine ; une réussite qui apporte la preuve que le consommateur est prêt à payer pour plus de qualité. Aux Etats-Unis, Chipotle fait depuis des années la démonstration que la montée en gamme de la restauration rapide est un facteur clé de réussite, reléguant le fast-food traditionnel au rang de restaurant bas de gamme.
Enfin, David Vidal, du cabinet Simon-Kucher & Partners, s’est étonné du perpétuel empirisme dans la fixation des prix. Il semble que s’aligner sur la concurrence soit toujours le principal critère utilisé. L’élasticité des prix et la connaissance du point de décrochage de la demande pour un niveau jugé trop élevé par le client ne sont pas des techniques répandues.
Aborder la rentabilité en appliquant les coefficients est une méthode devenue obsolète. En attendant de passer au Yield (encore réservé à l’hôtellerie pour le moment), il est temps d’utiliser le Revenu Management avec un bon outil de Menu Engineering et de travailler sur le CA et le revenu généré par chaque produit.
PROMOTION : TOUJOURS PLUS EST LA REGLE
L’étude de Food Service Vision a montré que les offres promotionnelles sont de plus en plus utilisées par les distributeurs comme les restaurateurs, sous des formes devenues multiples et, finalement, confuses ou peu lisibles. Pas de révolution mais une amplification de certaines promotions à l’exemple des burgers et de leurs ingrédients qui témoignent d’un vrai courant.
On peut regretter qu’aucun orateur n’ait souligné la montée en puissance de La Fourchette ni Groupon et de leurs promotions à -40, -50 ou -60% dont le volume d’offres ne cesse d’amplifier au fil du temps. Des propositions qui concernent il faut le reconnaître davantage la restauration à table que le snacking, mais qui commencent à poindre dans les cafétérias comme Flunch et dans quelques enseignes de restauration rapide qui tentent leur chance avec des promotions sans réservation, tel Big Fernand.
PLACE (LIEU) : DE STANDARD A PROTEIFORME
On assiste à une évolution d’une typologie de point de vente unique vers des lieux protéiformes sous la même enseigne. Exemple : l’évolution récente de Columbus Café dans les bars IdTGV ou en shop-in-the-shop chez Intermarché, apportant ainsi la preuve que certains concessionnaires font plus confiance à une enseigne connue et reconnue qu’à leur marque propre pour attirer le consommateur. Sans doute avec raison.
L’autre phénomène évoqué et illustré là encore par le concept Food Truck Station, bien sûr, ce sont les food trucks qui attirent de nouveaux restaurateurs mais aussi ceux qui veulent se rapprocher des consommateurs à l’exemple de Factory & Co qui possède 5 restaurants et une unité mobile.
Arrivent également les établissements à double fonction commerciale tels des restaurant-épiceries italiens comme Mio Padre ou Delitaly et un nouvel arrivant, Le Persillé (Palme d’Or du Leaders Club en avril dernier) un restaurant-boucherie de quartier. Des concepts qui permettent de développer fortement la vente à emporter et de générer un flux de clients en dehors des repas. Malin ! Comme ces commerçants indépendants qui sortent des machines à hot dog, à glaces ou à crèpes sur le trottoir pour prolonger leur activité principale dans le snacking.
Enfin, pour le snacking des GMS, Franprix a présenté son approche de définitions de typologie ou de profils de clients, magasin par magasin, afin d’adapter au mieux l’offre en linéaire à la demande.
PEOPLE : SERVICE HUMAIN ET SERVICE DIGITAL
Pour l’alimentation agro-industrielle, tout-droit sortie des usines, le produit ou le repas est assimilé à une marchandise. Avec le fait maison et le digital, elle se mue en Service, comme l’a rappelé Gilles Fumey. Service parce qu’il y a encore du personnel au comptoir et en salle, Service avec les bornes de commandes immédiates, les précommandes par internet ou sur smartphones, la géolocalisation et les échanges enseignes-clients sur les réseaux sociaux.
Extension et diversification. Promométro (filiale de la RATP) a expliqué par la voix de Gilles Alligner, son PDG, qu’au-delà des points de snacking, la société ouvrait des lieux de service non alimentaire tels que pressing, conciergerie, salles de sport, waterbike…
Parmi les grands enseignements de ce Congrès, je retiendrais la confirmation que la restauration rapide est subdivisée en sous segments avec l’« Access » ou économique qui restera du Fast Food (avec, à l’extrême, le sandwich à 1€ comme initié par Goutu en 2011 ou Oup’s aujourd’hui), le haut de gamme devenu Fast Casual (sandwicheries de qualité et gourmet burger avec un Ticket Moyen de 10 à 15€) et ceux qui, coincés au milieu, ont du souci à se faire car leur image restera floue et leur attractivité déclinante. Monter en gamme pour rejoindre le segment « Premium » est une des stratégies qui peut éviter à certains de descendre en enfer. A ce titre le pari de McDonald’s de se fragmenter en trois sous enseignes (McOriginal, McGourmet et le fameux McCafé) est osé mais, comme l’a rappelé Pascal Tepper (Boulanger, MOF et à la tête de 6 boulangeries dont 4 au Moyen-Orient), « tout le monde doit se remettre en question sinon on est mort ».
Cet article a été publié sur snacking.fr le 10 juin 2015
Suivez, rejoignez Service Attitude sur Facebook, Twitter, Linkedin, Scoopit, Pinterest
Pingback : Burger, hot dog, fréquentation, Congr&eg...
Aux Etats Unis, forte baisse des chaines de Fast Food au profit des chaines Fast Casual. « Sandwich and burger chains saw their market share fall from 63.5% to 54.5% from 1990 to 2014. » http://nrn.com/corporate-news/report-burger-sandwich-chains-lose-market-share